Chronique d'une épidémie (clairement) annoncée.
Le virus circule désormais à La Réunion
Levée du motif impérieux pour se rendre à La Réunion, suppression de l'obligation de quatorzaine et des tests à J+7, images de foules rassemblées autour de bars et restaurants de l'Ouest... Alors que la circulation du Covid-19 suit une inflation inquiétante à La Réunion, cette situation semble être la conséquence logique d'un relâchement. Lequel est, de fait, voulu et organisé par les autorités. Aucun outil coercitifs nécessaire pour endiguer toute reprise épidémique n'a été mis en place. Chronique d'une épidémie annoncée.
Le 11 mai dernier, La Réunion retrouvait le goût de la liberté suite à la décision du président de la République Emmanuel Macron de déconfiner progressivement une majeure partie du territoire français. Si La Réunion avait su largement limiter l’impact de l’épidémie jusque là, il était tout de même question de faire preuve de vigilance et de prudence.
Les regards se tournaient en effet d’ores et déjà vers le mois d’août et la fin des vacances scolaires pour annoncer une possible reprise épidémique au niveau local en cas de réouverture des frontières et de retour de la circulation des flux de personnes.
Déjà à l’époque, des voix se faisaient entendre pour limiter fortement les vols, cantonnant cette possibilité à des motifs impérieux justifiant un départ depuis La Réunion et une arrivée sur l’île. Certains allaient même jusqu’à militer pour la fermeture pure et simple de l’aéroport, à l’image de l’île Maurice qui a su durablement endiguer la crise sanitaire sur son territoire, à la faveur d’une fermeture stricte de son aéroport, au risque de pénaliser très fortement un secteur touristique fragilisé.
- Le secteur touristique a pesé de tout son poids -
A La Réunion, le scénario n’a pas été le même. Très logiquement, et fort légitimement, le secteur touristique local a fait part de son inquiétude face à la limitation des déplacements. Cela alors que la période des vacances scolaires pointait le bout de son nez.
Mobilisés, organisant des rassemblements de protestation, les professionnels du tourisme ont pesé de tout leur poids pour faire lever cette limitation, tout en plaidant pour une levée également de la quatorzaine obligatoire. Cette dernière mesure était en effet bien trop contraignante pour un touriste voulant visiter l’île et profiter des plages réunionnaises. L’enfermer 14 jours paraissait purement et simplement impossible.
C’est dans ce contexte que les autorités ont pris trois décisions qui conduisent sans surprise à la situation actuelle. La première fut de lever le motif impérieux pour venir à La Réunion, permettant le retour des touristes et des voyages d’agrément.
La seconde fut de lever la quatorzaine obligatoire, invitant simplement les voyageurs à respecter les gestes barrières et à porter le masque autant que faire se peut.
La dernière décision fut de lever le dépistage obligatoire à J-7, invitant là aussi fortement les voyageurs à le faire d’eux même en comptant sur leur sens des responsabilités. Les résultats parlent d’eux même, seuls 30% (40% dernièrement) accomplissent ce devoir civique 7 jours après leur arrivée sur l’île.
-Une (trop) grande tolérance -
A ces trois décisions qui allaient nécessairement relancer l’arrivée de cas importés, les autorités ont fait preuve d’une grande tolérance face à certains rassemblements. Les images des rues de Saint-Gilles bondées les week-ends sont dans toutes les mémoires, tout comme celles de centaines de jeunes massées pour une chicha party, fin juin, à Boucan Canot.
Alors oui, la France n’est plus en état d’urgence sanitaire depuis le 10 juillet dernier. Très clairement, certaines mesures n’avaient plus lieu d’être. Fallait-il pour autant que La Réunion se calque absolument sur les décisions nationales ? Et ce, alors que certaines caractéristiques sont radicalement différentes à celles de la Métropole : densité, exigüité et rentrée scolaire plus précoce.
La Réunion a suivi le tempo national pour se déconfiner, alors que la circulation virale était faible. La Réunion a suivi le tempo national pour globaliser le port du masque en extérieur, alors qu’il était tout à fait prévisible que les mois de juillet / août étaient extrêmement à risque. La Réunion a suivi le tempo national pour prendre des mesures plus coercitives et faire preuve de davantage de répression.
- Tellement prévisible -
La Réunion tergiverse encore pour prendre des mesures fortes de retour des limitations des déplacements via l’aéroport et de remise en place de tests obligatoires voire même de septaine (ou de quatorzaine obligatoire), alors que de nombreuses voix s’élèvent, dont celles des parlementaires, pour que ces mesures soient appliquées immédiatement.
En attendant, les derniers chiffres démontrent que La Réunion semble déjà être dépassée, ne parvenant plus à contrôler une épidémie qui croît de façon exponentielle et inquiétante. Après 3 mois de retour des jours heureux, La Réunion s’apprête donc à affronter sa première vague épidémique, tellement prévisible.
Le relâchement en valait-il vraiment la chandelle ?
Source : http://www.ipreunion.com/ / Photo RB