Voyageurs en provenance de Métropole la préfecture ne peut plus imposer une quatorzaine dans un hôtel dédié.
Le conseil constitutionnel a tranché
Le conseil constitutionnel a examiné le lundi 11 mai la loi prorogeant l'état d'urgence et il a tranché. Le préfet ne pourra plus imposer aux voyageurs en provenance de Métropole une quatorzaine dans un hôtel ou dans un autre centre dédié. La haute cour a estimé que cette mesure portait atteinte aux libertés individuelles. Les personnes arrivant dans l'île peuvent désormais choisir d'effectuer leur période d'isolement dans un centre ou à domicile. La mesure a commencé à être appliquée dès ce mardi. Plusieurs voyageurs en provenance de métropole ont pu rentrer chez elles après s'être engagée à respecter une stricte quatorzaine. Le placement en centres dédiés avait été décidé pour limiter la propagation du coronavirus à La Réunion.
La mesure était en vigueur depuis le 30 mars. Sur décision du ministère des outre-mer, toutes les personnes arrivant à La Réunion étaient systématiquement et immédiatement placées dans des hôtels réquisitionnés par l'Etat. Elles devaient y rester 14 jours sans possibilité de contact avec l'extérieur y compris leurs familles et leurs proches.
Ce dispositif avait provoqué la colère de certains voyageurs. Ils avaient quitté l'hôtel où ils étaient confinés à Saint-Denis et avaient regagné leur domicile. Verbalisés à plusieurs reprises et sommées de payer de lourdes amendes, ces personnes étaient finalement repartis dans le centre dédié jusqu'à la fin de leur quatorzaine.
Le conseil constitutionnel a jugé que l'application de cette quatorzaine forcée dans un lieu réquisitionné ne permet pas de "sauvegarder" la liberté individuelle des personnes.
- Atteinte aux libertés individuelles -
La haute cour a tiqué sur le fait que la mesure était décidée par l'Administration hors cadre juridique. "La liberté individuelle ne peut être tenue pour sauvegardée que si le juge intervient dans le plus court délai possible" précise la cour constitutionnelle. En clair cela signifie qu'une mesure privative de liberté ne peut être prise que par un juge.
Ce qui relève du droit commun. En effet, seul un juge des libertés et de la détention peut décider de l'enfermement d'une personne y compris lorsqu'il est réclamé par un procureur.
Tout manquement à ce cadre réglementaire peut être considéré comme illégal. La haute cour précise à ce propos "les mesures de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement peuvent faire à tout moment l'objet d'un recours par l'intéressé ou par le procureur de la République devant le juge des libertés et de la détention en vue de la mainlevée de la mesure. Le juge des libertés et de la détention, qui peut également se saisir d'office à tout moment, statue dans un délai de soixante-douze heures par une ordonnance motivée immédiatement exécutoire".
Le nouveau régime de quatorzaine permet donc désormais à chaque personne de choisir entre quatorzaine en centre dédié ou à domicile. La préfecture précise toutefois dans un communiqué publié tard ce mardi soir : "i les conditions de maintien à domicile ne permettent pas de limiter le risque de contamination, le préfet pourra, sur proposition de la directrice générale de l’Agence Régionale de Santé, imposer à la personne d’effectuer sa quatorzaine dans un lieu d’hébergement dédié".
- Des voyageurs sont rentrés directement chez eux -
Estimant que "la quatorzaine (contribue) efficacement à la maîtrise du risque de propagation du coronavirus à La Réunion", le préfet dit "(souhaiter) que souhaite, dans l’attente de la parution des textes d’application de la nouvelle loi, son maintien sur la base de la responsabilité individuelle"
Le nouveau dispositif d'encadrement de la quatorzaine a été appliquée dès mardi matin aux 150 voyageur en provenance de Métropole. La préfecture souligne qu'ils "ont fait l’objet d’un dépistage du Covid-19 et, dans l’attente de leurs résultats (qui seront connus ce mercredi matin – ndlr), ont été invités à rester dans le centre". Une "invitation" déclinée par plusieurs voyageurs qui ont immédiatement regagné leur domicile après s'être engagés à respecter un strict isolement pendant 14 jours.
Selon le communiqué de la préfecture, il a été demandé à ces personne de questionner sur leur capacité à disposer d’une chambre, d’une salle de bain et de toilettes privatives et sur le risque qu’elles pourraient faire peser sur leurs proches, en particulier si elles vivaient avec une personne susceptible de développer une forme grave du coronavirus", les personnes âgées notamment.
La préfecture dit qu'elle travaille déjà avec l’Agence régionale de santé "à la mise en place (…) de dispositifs complémentaires de maîtrise du risque sanitaire, qui s’appuieront notamment sur la prise de température par les compagnies aériennes avant l’embarquement des passagers et sur le dépistage systématique des personnes faisant le choix de rejoindre leur domicile plutôt que de rester en centre dédié de quatorzaine".
- Actions en justice -
Le préfet affirme que "l’évolution du droit n’entraîne pas de conséquences pour les personnes placées en quatorzaine avant la promulgation de la nouvelle loi : les quatorzaines non échues au 12 mai 2020 ont donc vocation à se poursuivre jusqu’à leur terme".
Avant lui, la ministre des outre-mer, Annick Girardin, a elle ausi estimé que les isolements obligatoires en cours devaient se poursuivre.
Cette affirmation sur la poursuite des quatorzaine en cours est basée sur le fait qu'en droit français, sauf exception, une loi n'est pas rétroactive. C'est-à-dire qu'elle ne peut pas s'appliquer à des faits et des situations ayant eu lieu avant sa promulgation.
Reste que les lois garantissant les libertés individuelles, notamment celles régissant la privation de liberté, sont bien antérieures à la décision du gouvernement d'imposer des quatorzaine en centres dédiés.
Une décision qui selon la cour constitutionnelle peut donc "faire à tout moment l'objet d'un recours par l'intéressé (la personne placée d'office en centre dédié – ndlr) ou par le procureur de la République devant le juge des libertés et de la détention en vue de la mainlevée de la mesure".
Ce qui laisse la porte ouverte à des actions en justice de la part des voyageurs placés en quatorzaine obligatoire hors de chez eux. Ce qui laisse la porte ouverte à des actions en justice de la part des voyageurs placés en quatorzaine obligatoire hors de chez eux et à ceux qui ont verbalisés pour en être sortis.
Source : http://www.ipreunion.com/ / Photo RB