De la fragilité de nos jeunes
Synonyme de changement, la jeunesse est une période où filles et garçons opèrent leurs choix de vie. Dans une étude financée par l'ARS, l'Observatoire Régional de la Santé Océan Indien (ORS OI) s'est penché sur leurs situations.
Le saviez-vous ? C'est la commune du Port qui compte le plus de jeunes. 22% des habitants portois sont âgés de 13 à 25 ans. « La commune la plus jeune de l’île est le Port devant les communes du Nord-Est, elles-mêmes plus jeunes que le Sud de La Réunion »,relate l'ORS dans son dernier tableau de bord sur « La santé des jeunes ». Des jeunes qui représentent 19% de la population réunionnaise. Que montre cette étude ? En voici les principaux enseignements :
> De nombreux enfants de familles monoparentales
L'étude montre que “la part de jeunes enfants d’une famille monoparentale est plus importante ici qu’en Métropole et la décohabitation avec les parents pour une vie de couple ou une installation seul est moins précoce qu’en Métropole”. En revanche, la fécondité des filles est plus précoce . D'ailleurs, la part des 20-25 ans en couples avec enfant ou adulte d’une famille monoparentale est plus élevée sur l’île.
> Une fragilité importante
La jeunesse est l'occasion de tenter l'interdit pour certains... “Cette période de changement est également propice à des risques de basculement vers des comportements défavorables à la santé (prises de risques, mauvaise hygiène de vie, vulnérabilité psychologique…). Et tous les jeunes ne sont pas équitablement armés pour faire en sorte que ces comportements n’apparaissent pas et/ou ne s’installent pas durablement”, note l'Observatoire régional de la Santé. D'où l’importance de repérer les signaux d’alerte le plus précocement possible afin d'éviter que les inégalités sociales et sanitaires ne s’accentuent. D’autant plus sur un territoire où les jeunes sont plus fortement exposés aux difficultés sociales.
> Le taux de pauvreté chez les jeunes élevé
“Le taux d’emploi des 15-24 ans est presque deux fois moins élevé à La Réunion qu’au niveau national, et le taux de chômage est plus important, en particulier pour les jeunes filles. La population active de 15 à 24 ans ayant un emploi connaît des conditions d’emploi plus précaires sur l’île qu’en Métropole”, note l'ORS.
> 4 677 naissances de mamans âgées de 13 à 25 ans
L'Observatoire note aussi que les jeunes se sentent, de manière générale, en bonne santé . Près du quart déclarent toutefois souffrir de façon chronique. Ils sont d'ailleurs 3 % des 15-24 ans à bénéficier du dispositif Affection Longue Durée (ALD), “avec un recours particulièrement important chez les jeunes réunionnais pour l’ALD diabète”. Selon l'étude de l'ORS, “les principaux motifs d’hospitalisation des jeunes sont pour les filles les grossesses et accouchements et pour les garçons, les lésions traumatiques et empoisonnement et maladies de l’appareil digestif”. Il y a eu 4677 naissances de mères âgées de 13 à 25 ans dont 311 de mineures de moins de 13 ans.
> Une mortalité plus masculine
Les garçons sont les premières victimes sur les routes.. “La mortalité chez les jeunes est principalement masculine et est due à des causes externes de morbidité et mortalité, en particulier des accidents de la route et les suicides”. La santé mentale pose probleme chez les jeunes.” 23 décès par suicide chez les 15-24 ans ont été comptabilisés en 3 ans (entre 2013 et 2015) et 400 tentatives de suicide ont été enregistrées dans les établissements de soins en un an pour les moins de 25 ans”, note l'Observatoire régional de Santé. Et si les filles sont plus fragiles psychologiquement (risque de dépression, tentatives de suicides), la mortalité par suicide est plus importante chez les garçons.
> Alcool et tabac en hausse chez les filles
L'ORS estime aussi que les consommations de produits psychoactifs sont plus problématiques chez les jeunes garçons que chez les jeunes filles âgés de 15 à 24 ans. “Les fumeurs quotidiens sont deux fois plus nombreux chez les garçons que chez les filles pour cette tranche d’âge. Le constat est le même pour les consommations excessives d’alcool. Chez les jeunes de 17 ans l'ORS montre une plus en plus grande proximité des comportements masculins et féminins, notamment pour les API répétées et le tabagisme quotidien. On note également une évolution à la hausse pour l’expérimentation de cannabis chez les jeunes de 17 ans.
> Une addiction plus forte pour Internet
Un quart des lycéens ont une pratique d’internet considérée comme invasive (plus de 4 heures par jour).Les réseaux sociaux sont particulièrement chronophages pour les filles et les jeux en ligne le sont particulièrement pour les garçons.
> Les jeunes mangent moins de légumes et grossissent
Les jeunes réunionnais sont seulement 1 sur 10 à suivre les bonnes recommandations sur la nutrition. Ils consomment moins de fruits et légumes et consomment plus de boissons sucrées que leurs ainés. Un jeune de 15 à 25 ans sur cinq est en surcharge pondérale à La Réunion. A noter que les garçons pratiquent plus de sport que les filles. La moitié des lycéens ont des séances de sport pluri-hebdomadaires contre un quart des lycéennes.
> Un manque cruel d'établissements pour handicapés
Le taux d’équipement en établissement pour enfant handicapé est plus faible à La Réunion qu’en Métropole. 1 900 réunionnais de 13 à 25 ans sont placés en établissement en 201 et 746 élèves en situation de handicap sont scolarisés en collège et lycée à La Réunion en 2017.
> Ils sont plus exposés aux violences
Les jeunes sont particulièrement exposés aux violences, en particulier à l’ensemble des atteintes aux personnes. Les femmes subissent plus de violences familiales et les hommes davantage les violences physiques ou les vols. En 2017, on comptabilise 210 victimes de 14 à 24 ans sur les routes réunionnaises. Ce chiffre est en diminution depuis 10 ans
Les points de vigilance
Les points de vigilance chez les garçons sont les prises de risques avec des consommations de produits psychoactifs plus régulières, une accidentologie et une délinquance plus marquée, des connaissances et une conscience des risques moins marquées. Les jeunes filles ont des problématiques spécifiques comme les grossesses, la contraception, les IVG, une plus grande vulnérabilité psychologique et une évolution inquiétante pour les usages de produits psychoactifs, avec un rapprochement des comportements masculins. Il est difficile d’observer les jeunes dans leur diversité, note l'ORS. Des travaux spécifiques seraient à entreprendre sur les jeunes étudiants, les jeunes en mission locales, les jeunes ayant une pathologie chronique, les grossesses chez les mineures… Il est également difficile d’observer et de rendre compte, sans une étude spécifique, de l’imbrication des problèmes de santé des jeunes et des déterminants sociaux. Il faut poursuivre l’observation pour suivre les évolutions et mesurer l’impact des politiques publiques et développer d’autres axes : le recours aux soins, les parcours de soins, l’impact des nouvelles technologies sur les comportements.
"Le premier rapport sexuel est de plus en plus tôt"
“Les comportements sur la sexualité sont en évolution puisque le premier rapport sexuel est de plus en plus tôt et de plus en plus désiré à ce moment-là chez les filles. Cependant, elles sont toujours plus nombreuses que les garçons à accepter un premier rapport sans en avoir vraiment envie”, note l'ORS. Les premiers rapports chez les jeunes sont “plus fréquemment protégés” que les générations plus anciennes mais l’utilisation de la contraception n’a pas beaucoup évolué. “56 % des jeunes réunionnaises de 15 à 25 ans sexuellement actives utilisent un moyen contraceptif (autre que le préservatif) et les plus jeunes d’entre elles sont particulièrement utilisatrices de la contraception d’urgence”. Cependant l’IVG est toujours importante, notamment chez les mineures (2 fois plus importante qu’en métropole).
Source : https://www.clicanoo.re/ / photo ARS