Accompagnement de l'autisme : peut mieux faire.
8 000 personnes atteintes à La Réunion
On comptabiliserait environ 8 000 personnes autistes à La Réunion, si l'on s'en tient aux estimations des scientifiques du monde entier affirmant que 1% de la population mondiale ferait parti du spectre autistique. Un chiffre considérable, qui est toutefois probablement bien inférieur à la réalité.
Si les troubles du spectre de l’autisme (TSA) font l’objet de plus en plus d’études aujourd’hui, cela a été un processus long avant que les médecins n’en reconnaissent l’existence. Pouvant se manifester de diverses façons, avec des formes légères ou très sévères, l’autisme reste encore aujourd’hui assez mal compris.
Et si le diagnostic chez les enfants se fait de plus en plus tôt, il existe une réelle sous-évaluation du nombre d’adultes faisant partie du spectre. "Nous recevons régulièrement des personnes de 40, 50 ans qui ont à peine été diagnostiquées" explique Valérie Robiliard, directrice adjointe du Centre de Ressources Interrégional pour l'Autisme Réunion/Mayotte (CRIA). "Les places en centre médico-sociaux pour les adultes sont extrêmement limitées" constate-t-elle.
Tellement limitées que certains adultes sont hospitalisés dans des structures pour enfants et adolescents, en respect de l’amendement "Creton" qui s’assure que personne ne soit expulsé d’un centre pour enfant s’il ne devait pas trouver de place dans un centre pour adultes. "C’est un amendement noble, mais qui embolise le système" continue Valérie Robiliard. "Certains enfants sont d’ailleurs déscolarisés, par manque de place en centre médico-social et par manque d’accompagnateurs" précise par ailleurs Nathalie Faucher, présidente de l’association Autisme Réunion.
Des efforts, mais pas assez
"On peut tout de même saluer les efforts du gouvernement français à endiguer l’isolement dont été victimes les personnes autistes" souligne Nathalie Faucher. Entre 2013 et 2017, ce sont 10 millions d’euros qui avaient été investis à La Réunion et à Mayotte pour améliorer l’accompagnement de personnes porteuses de TSA. Une quarantaine de places devraient d’ailleurs être créées en centre médico-social grâce à ce plan sous peu. Une troisième unité maternelle devrait aussi voir le jour.
"400 millions d’euros ont été débloqués pour le quatrième plan autisme 2018-2022, mais nous ignorons les sommes exactes qui seront allouées à notre île pour l’instant" continue-t-elle. Une centaine de mesures sont listées dans ce plan, qui se base sur cinq grands principes : "remettre la science au cœur de la politique publique de l’autisme en dotant la France d’une recherche d’excellence, intervenir précocement auprès des enfants, rattraper le retard en matière de scolarisation, soutenir la pleine citoyenneté des adultes et soutenir les familles et reconnaître leur expertise".
"Ce sont de belles promesses, mais nous savons qu’elles ne pourront pas toutes être tenues" regrette la présidente de Autisme Réunion. "La France s’est penchée sur la question de l’autisme bien plus tard que ses voisins" explique Valérie Robiliard. "Cela fait seulement une quinzaine d’années que le gouvernement fait de réels efforts pour rattraper son retard ". Un retard qu’il rattrape tout de même petit à petit, mais qui a donc encore de nombreuses failles" dit-elle encore.
Un manque de formation
Enfin, si les médecins sont de mieux en mieux sensibilisés à la question, et que les temps de diagnostic sont aujourd’hui moins longs, ils restent de nombreuses lacunes à combler. "C’est toute la société qui doit être sensibilisée, en priorité l’Éducation nationale, pas seulement les spécialistes" s’accordent les deux femmes. Aujourd’hui, seulement un tiers des enfants autistes sont scolarisés en maternelle deux jours ou moins. A l’entrée au collège, on comptabilise une baisse de 13% de la scolarisation des enfants autistes.
"Et puis ce sont aussi les dentistes, les coiffeurs, toutes ces personnes que nous devons tous consulter qui ne sont pas adaptées aux différences sensorielles que l’on retrouve chez les personnes autistes" conclut Valérie Fauché. Le chantier est donc encore long avant que les personnes porteuses de TSA ne puissent trouver une société qui s’est adaptée à leurs difficultés, mais on peut tout de même dire que nous sommes sur le bon chemin.
Source : as/ www.ipreunion.com / photo IP