Le CHU dispose des compétences indispensable à un établissement de santé de haut niveau capable de répondre aux attentes des Réunionnais. Le renouveau de la greffe rénale, transférée en service de cardiologie est la preuve d'une bonne gouvernance…
Urgences, Grey's Anatomy… au-delà des séries télévisées, le fonctionnement des services hospitaliers peut présenter des situations, des rapports humains, des "événements indésirables graves" qui soumettent personnels et patients à des crises dont l'issue peut-être fatale. Il n'est pas d'intervention chirurgicale totalement anodine, parce que le corps humain pour être une extraordinaire machinerie, n'est pas une mécanique dont on peut simplement remplacer les pièces en bout de potentiel, parce que tout n'est pas toujours prévisible et que l'erreur humaine est elle aussi toujours possible… Même si des années d'études et de formation, des gestes répétés à la perfection, des procédures tendent à limiter la marge d'erreur au taux le plus bas. La chirurgie est un art de la vie, laquelle ne tient parfois qu'à un fil. Et s'il arrive que les cas les plus désespérés soient sauvés, le contraire advient aussi, par accident, par manque de chance, erreur d'interprétation, entre autres aléas… Et ces fameux "événements indésirables graves" donnent alors lieu à des cessions d'analyse rétrospectives appelées "revues de morbi-mortalité" (RMM). Leur finalité est de comprendre l'événement et d'en éviter si possible la répétition. Le rapport d'inspection du service d'urologie du site de Félix-Guyon, réalisé sous le contrôle du Professeur Eric Chevallier et l'égide du Conseil national des Universités d'Urologie, est intervenu suite à une série de dysfonctionnements constatés par la direction du CHU, et apparaissait un peu comme une rechute de la crise qui avait mené à la fermeture dudit service dans les années 2010-2011. Dans la guerre de "chefferie" et d'ego au sein du service urologie, entre praticiens concurrents et affrontés, "l'affaire de la greffe" est citée comme un casus belli… De quoi s'agit-il exactement ? Sur le fond à une série de décès et d'incidents graves liés à la greffe rénale, dont certains ne résultaient pas d'erreurs médicales, quand d'autres étaient les marqueurs d'erreurs humaines dramatiques.
Le délai de prise en charge, le jour de la greffe, est l'un des plus rapides au niveau national
Ainsi, en février 2011, un patient dont seul le rein droit était malade, avait-il subi par erreur une ablation du rein gauche sain. Le chirurgien fautif, l’urologue Bao Le Thaï, avait été suspendu et s'était plus tard retrouvé poursuivi en justice à Ajaccio, en compagnie de deux autres chirurgiens, sur un autre dossier. En octobre 2011, l'activité de greffe étant suspendue depuis un an, un autre incident grave est venu perturber le service et la filière. Un patient de La Réunion qui avait bénéficié d'une greffe de rein à Lyon, après avoir voyagé en même temps que l'organe prélevé sur un donneur local, a développé une infection grave, le rein ayant été contaminé avant opération à Bellepierre. Il s'en était suivi une opération d'urgence et le retrait de l'organe en cause. Compte-tenu de ces précédents et de l'état des relations entre praticiens du service d'urologie, Lionel Callenge a décidé de transférer l'activité de greffe sur l’équipe de chirurgie cardiaque, dirigée par le docteur Guillaume Biland. Un transfert qui pourrait faire tiquer les sceptiques, si la greffe rénale n'était pas, compte-tenu du diabète et de l'insuffisance rénale terminale, une priorité du projet médical du CHU de La Réunion. De fait, les résultats enregistrés par l'équipe de Cardio sont plus qu'encourageants. Depuis le début de l'année 2018, le service a réalisé 30 greffes, soit autant qu'en 2017. Lionel Calenge caresse l'espoir d'atteindre une soixantaine de greffe en moyenne à l'année, la preuve que le CHU assume son rang et dispose de la compétence nécessaire pour répondre au besoin des patients réunionnais. Le D.G du CHU explique qu'à La Réunion, le délai de prise en charge, le jour de la greffe, est l'un des plus rapides au niveau national, ce qui démontre l’efficacité des équipes impliquée dans la chaine. M. Calenge souligne en sus les innovations techniques mises en œuvre par cette équipe qui allie au process classique de greffe des acquis récents en matière d'immunologie. Un progrès qui limite le risque de rejet des greffons. Le CHU travaille encore sur l'élargissement du potentiel de dons pour les Réunionnais actuellement dialysés et qui espèrent une greffe. La meilleure façon de traiter et guérir l'insuffisance rénale terminale.
Que les urologues de Félix Guyon se consument dans une guéguerre intestine est franchement dramatique pour l'offre de santé à La Réunion. Le rapport d'inspection dont nous traitons, fait état, sans ironie, de "conflits entre chirurgiens générant un climat de suspicion mutuelle, de recherche active de part et d'autre, d'erreurs médicales pour les dévoiler à la presse locale…" La "fuite" de ce rapport en est l'expression même. Il fait écho à des amabilités telles que "la publication dans la presse de morceaux choisis du rapport d'inspection provisoire mettant en exergue le PU-PH d'urologie, mais aussi le retrait de la liste des prèleveurs des urologues du Sud et de l'un des PH du Nord, malgré sa demande de participation…" Ces comportements, entre autres décrits précédemment, non contents de décrédibiliser le service d'urologie, plombent la confiance que les Réunionnais sont en droit de placer dans leur système de santé, alors que 300 personnes attendent une greffe et que plus de 2000 vivent en étant dialysés. Tout récemment la Fédération autonome de la fonction publique hospitalière de La Réunion, de Catherine Gaud, demandait la tête de Lionel Calenge ; l'une des urologues - par ailleurs trésorière cette même FAFPH - du service décrit par le rapport que nous avons présenté, se plaignait du "manque de matériel"…
Source: Clicanoo. Par Philippe Le Claire. Le 14/08/2018.