Zika, Chikungunya, dengue : des maladies transmises par le moustique, la dengue est la moins agressive pour le futur bébé. Néanmoins, il existe quelques rares cas de mort in utero. Même si les risques sont limités, il ne faut pas relâcher la prévention, conseille le Réseau Périnatalité de La Réunion, qui s'est fortement investi pour faire passer le message auprès des cabinets médicaux, des PMI, des pharmacies.
Vendredi 27 juillet 2018, on ne connaît pas le nombre de femmes enceintes qui auraient été concernées par l’épidémie de dengue depuis quelques mois. " Les chiffres connus de personnes atteintes par la dengue ne font pas de distinction particulière entre les hommes et les femmes, les femmes et les femmes enceintes ", explique Sylvie Boukerrou, sage-femme coordinatrice et Directrice de Repère, Réseau Périnatalité à L’Ile de La Réunion. " Et puis, comme nous le signalons dans nos actions de prévention, il ne faut pas oublier que 80% des personnes atteintes sont des porteurs sains, c’est à dire qu’elles ne présentent aucun symptôme mais sont porteuses du virus. " Si elles sont piquées par un moustique, celui-ci devient contaminant quelques jours plus tard pour la durée de sa vie. S’il pique une autre personne, il transmet alors le virus ", précise la sage-femme.
Des répulsifs, mais pas n’importe lesquels
D’où la nécessité de se protéger avec des répulsifs, à condition de respecter les dosages indiqués, c’est à dire pas plus de trois applications par jour et de les appliquer à distance (20 minutes après) de l’application de la crème solaire. " Tous les répulsifs ne sont pas adaptés à la femme enceinte ", alerte Sylvie Boukerrou. Il faut donc demander conseil à son pharmacien. " Mais vous pouvez recourir aussi aux huiles essentielles de géranium rosa et de citronnelle.
C’est très efficace. Vous pouvez aller jusqu’à 4 ou 5 gouttes par jour d’huiles essentielles. Personnellement, je conseille de mélanger à une noisette de crème hydratante une goutte d’huile essentielle de géranium rose et une goutte de citronnelle et de l’appliquer sur les zones du corps exposées. Vous pouvez aussi porter des vêtements longs et pulvériser les huiles essentielles sur les vêtements ", conseille la Directrice de Repère, qui recommande aussi l’usage de moustiquaires imprégnées d’insecticides. " Attention, précise-t-elle, il faut vérifier qu’elle soit en bon état, sans trous, et il ne faut ni la laver ni la ré-asperger d’insecticide. "
L’association Repère donne aussi quelques conseils de sécurité, en présence de très jeunes enfants qui ont tendance à tout porter à la bouche : " Il ne faut pas laisser les moustiquaires imprégnées d’insecticides à leur portée ! ". Et en amont, appliquer les règles de prévention connues : éviter l’eau stagnante, brancher un ventilo ou la climatisation, imparables pour éloigner les moustiques.
Des chiffres rassurants mais la prudence est de mise
Si l’épidémie est enrayée et que le nombre de personnes infectées la semaine dernière a fortement décru, il faut maintenir la prudence. Comme le rappelle Sylvie Boukerrou, l’épidémie de Chikungunya à La Réunion, au début des années 2000, a été un électrochoc : " Au début de l’épidémie, on n’avait pas d’études sur l’impact pendant la grossesse de ce virus qui peut avoir des conséquences graves sur le fœtus.
Quand on a réalisé ce que cela pouvait occasionner pendant la grossesse, cela a permis de mettre en place une vraie politique de prévention chaque année, tant par la démoustication orchestrée par l’Agence Régionale de Santé Océan Indien que par l’information des femmes enceintes. Cette prise de conscience et les mesures qui ont suivi sont peut-être aussi une piste d’explication de l’impact très modéré de la dengue sur les femmes enceintes cette année malgré l’épidémie déclarée ", conclut la sage-femme.
Une étude qui a incité à la prévention à La Réunion
L’épidémie de Chikungunya à La Réunion, en 2005, avait en effet permis de lancer une étude de cohorte rétrospective concernant l’issue de 160 grossesses de patientes infectées, dans le sud de la Réunion, entre le 1er juin 2005 et le 28 février 2006.
Le corps médical avait en effet réalisé que l’évaluation des conséquences de l’infection chez la femme enceinte, et notamment le risque de transmission materno-fœtale, n’avaient jamais été étudiés.
L’étude, publiée dans le Journal de Gynécologie Obstétrique et Biologie de la reproduction (éditions Elsevier Masson) en octobre 2006, a établi que " parmi 9 cas de mort fœtale de moins de 22 SA, l’imputabilité du virus est évoquée dans 3 cas ". De même, alors que 151 femmes ont été infectées pendant la grossesse, aucun nouveau-né mis au monde par les 118 femmes ayant accouché en dehors de la période virémique n’a présenté d’atteinte virale. En revanche, parmi les 33 femmes qui ont accouché en période virémique, 16 nouveau-nés (48,5 %) ont présenté un Chikungunya néonatal.
L’étude en a conclu que " le risque de contamination fœtale avant 22 SA semble rare, mais grave. Après 22 SA, les cas d’atteintes néonatales sont observés uniquement chez les nouveau-nés des patientes en période virémique. Un passage transplacentaire du virus semble probable. "
Tout ça pour en conclure, en bonne logique, qu’on ne sait jamais ce qu’un insecte peut transporter comme agent infectieux, surtout par les temps qui courent. La prévention, comme le rappelle le Réseau Périnatalité par la voix de sa directrice, Sylvie Boukerrou, reste essentielle, même si la dengue est moins dangereuse pour le fœtus que Zika ou Chikungunya.
Source: IP Réunion. Par ML. Le 30/07/2018.