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FJ
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mercredi 14 mars 2018
Le 3 octobre dernier, quelques j ours après la cessation de mes fonctions de délégué général de la Fédération hospitalière de France (FHF),
je prenais la parole pour dénoncer l' instrumentalisation dont le CHU de La Réunion et la FHF avaient été victimes dans le contexte de l'éclatement du scandale de la dialyse à La Réunion. Les développements de ces derniers jours m'amènent à m'exprimer à nouveau.
Dans cette tribune de début octobre, je mettais en exergue le « deux poids, deux mesures » dans les contrôles appliqués aux offreurs de soins à La Réunion.
D'un côté, le CHU n'a cessé de faire l'objet d'inspections et de sollicitations administratives de tous ordres. La transparence constitue bien entendu une exigence fondamentale de la gestion publique. J'ai toujours veillé, dans l'exercice de mes fonctions, à ce que ce principe essentiel soit scrupuleusement respecté. Mais, en l'espèce, force est de constater l'ampleur des moyens mobilisés pour le contrôle du CHU avec une mission diligentée par trois inspecteurs généraux des affaires sociales. Cette mission aboutissait in fine à un rapport reposant sur des éléments factuels majeurs inexacts (sur l'engagement des opérations d' investissement ou sur les effets sur la situation budgétaire du CHU de la forte progression des évacuations sanitaires de patients étrangers en situation irrégulière, principalement venus des Comores) et dont l'établissement et la communication ne respectaient que très imparfaitement les exigences du principe du contradictoire. Ce rapport, pourtant établi six mois plus tôt, réémergeait médiatiquement quelques jours avant le déplacement de la Ministre de la Santé et des Solidarités à La Réunion et à Mayotte au mois de septembre dernier. La Ministre s'est, heureusement, démarquée sur le fond de ce rapport : une décision de soutien au CHU pour l'accueil des patients évacués sanitaires de Mayotte était prise dès août 2017 et la politique d'investissements était validée en COPERMO le 31 janvier dernier.
D'un autre côté, la même rigueur dans les contrôles ne s'appliquait pas à d'autres offreurs de soins. Je mettais en exergue, dès cette tribune d'octobre, les dysfonctionnements issus du modèle économique de la prise en charge de 1 ' insuffisance rénale chronique, dans un contexte de surprévalence triple à La Réunion par rapport à la moyenne nationale. L'association Renaloo - qui représente les patients insuffisants rénaux chroniques- avait souligné avec force les problématiques engendrées à La Réunion par ce modèle pour la qualité de la prise en charge des patients. Une situation absurde et inacceptable a été engendrée conduisant à ce que les patients soient maintenus contre leur intérêt médical en dialyse en centre et en unités de dialyse médicalisées (UDM), modalités les plus lourdes, dont les séances sont plus rémunérées que les autres modes de prise en charge. En conséquence, La Réunion connaît des taux massivement inférieurs à la moyenne nationale pour la dialyse autonome (comme la dialyse péritonéale et 1 'hémodialyse à domicile), mais aussi pour 1 'accès à la transplantation rénale, reconnue comme le meilleur traitement.
Cette situation génère des effets particulièrement lourds et péjoratifs pour la vie de centaines de patients : ils ne reçoivent pas le traitement médical adapté et se voient privés d'une vie familiale et professionnelle normale compte tenu de la lourdeur des séances de dialyse en centres. Ces dysfonctionnements du modèle économique de la dialyse ont été clairement démontrés par la Cour des comptes dès son rapport de 2015. Pourtant, au niveau local, aucun contrôle réel de la gestion des offreurs de soins concernés n'était mis en oeuvre pendant des années.
Cette non-pertinence majeure des soins- très coûteuse, en outre, pour la Sécurité sociale - fondait la saisine opérée en urgence par Renaloo auprès de la Ministre de la Santé à l'occasion de sa visite à La Réunion fin septembre. Je prévenais, quant à moi, la Ministre des risques d'instrumentalisation de son déplacement. De nombreux éléments laissaient, en effet, penser qu'une manoeuvre de diversion avait été orchestrée en septembre, en instrumentalisant le CHU et la FHF, pour que le sujet de la dialyse soit médiatiquement éclipsé et passé sous silence au cours de la visite ministérielle. J'opérais, par ailleurs, un lancement formel d'alerte sanitaire sur la prise en charge de l'insuffisance rénale.
La presse locale réunionnaise ne s'est heureusement pas laissée abuser. Elle relayait ma tribune et les interventions de Renaloo. Dans les semaines qui suivaient, le Journal de 1 "île de La Réunion ne cessait d'apporter de nouveaux éléments aux accusations très graves portées sur la gestion de l'opérateur AURAR depuis le mois de juin (avec notamment l'orientation de «résultats bénéficiaires» massifs par cet opérateur pourtant théoriquement à but non lucratif vers un empilement de structures commerciales annexes éloignées de la prise en charge directe des patients). Le JIR mettait également en doute la transparence du processus d'attribution des autorisations d'exercice des activités de dialyse et la régularité des actes facturés à l'assurance maladie.
Ce lundi, le JIR produit de nouvelles révélations : une compensation du CICE aurait été irrégulièrement versée à l'AURAR et cet opérateur a bénéficié d'une attribution très significative de crédits du Fonds d'intervention régional à la fin de l'année 2017 alors même que le scandale de la dialyse avait déjà été révélé. Les moyens concernés ont été prélevés en tout ou partie sur des enveloppes susceptibles d'être dirigées vers les établissements du service public.
Je suis profondément choqué et en colère à la suite de ces révélations. Au cours des quatre années à la direction du CHU, je me suis engagé, avec les équipes de l'établissement, pour le développement de l'accès à la greffe rénale. J'ai exercé moi-même la présidence du réseau de prélèvements d'organes et nous nous sommes mobilisés pour le renforcement des actions de sensibilisation et de prévention auprès de la population.
Je n'avais pas réalisé, au cours de ces années de fonctions à La Réunion, que les règles du jeu étaient faussées dès le départ. Pendant que ces actions de soutien à la greffe et au développement des prélèvements d'organes étaient engagées, un système opaque tournait à plein régime pour maintenir, contre leur intérêt médical, les patients dialysés en centre et en UDM, dégager de la rentabilité et empêcher concrètement leur orientation vers la greffe ainsi que le développement de modes alternatifs de prises en charge autonomes. J'ai commencé à être alerté sur les tenants et aboutissants réels de ce système et les conflits d ' intérêts associés à partir du milieu de l'année 2017.
Cette situation constitue un détournement majeur de l'objet du modèle privé à but non lucratif, ce qui est très préjudiciable pour notre système de santé dans son ensemble. Je crois pourtant profondément à la pertinence de ce modèle et de ses valeurs. La FEHAP a d' ailleurs eu une attitude exemplaire qu'il faut souligner dans la gestion du cas de l'AURAR.
Ce système déviant n'aurait sans doute pas pu se développer à cette échelle et durer aussi longtemps sans l' existence de situations créatrices de conflits d'intérêt majeurs à des niveaux très importants du système de soins local et dans le cadre de la commission spécialisée de 1 'offre de soins. J'ai contribué, avec d'autres acteurs de santé, à lancer l'alerte sur ces dysfonctionnements et ces conflits d' intérêt.
Des premières réactions des pouvoirs publics sont d'ores et déjà intervenues. Je veux saluer, à cet égard, la mobilisation d'Agnès Buzyn, Ministre de la Santé et des Solidarités sur ce dossier. La Ministre a, en effet, dès le début du mois d'octobre dernier décidé de saisir la Chambre régionale des comptes du dossier de l' AURAR et fait de l'insuffisance rénale chronique une des thématiques prioritaires de pertinence des soins dans le cadre de la stratégie de transformation de l'offre de soins annoncée voici quelques jours par le Gouvernement.
Alain Milon, Président de la Commission des Affaires sociales du Sénat, dénonçait le scandale de la dialyse à La Réunion et la situation de l'AURAR dès l'examen du dernier projet de loi de financement de la Sécurité sociale et engageait une mission d'information parlementaire sur le dossier.
Jean-Louis Touraine démontrait, à l'occasion de sa mission-flash réalisée au mois de décembre dernier, l'ensemble des obstacles concrets .devant encore être levés pour encourager le développement du prélèvement d' organes.
Ces premières réactions doivent encore être amplifiées à très brève échéance. Les situations de non pertinence des soins dans la prise en charge des patients continuent à exister sur le terrain. En outre, les acteurs qui ont pris leurs responsabilités, au niveau local et au niveau national, pour lancer l'alerte ont été victimes de calomnies et de tentatives d' intimidation. J'ai encore été informé ces derniers jours du renouvellement d'actions inacceptables de ce genre.
Pour ces lanceurs d'alerte mais aussi et surtout pour les patients qui doivent bénéficier du mode de prise en charge de l' insuffisance rénale adapté à leurs besoins, nous ne pouvons plus attendre. Des actions fortes doivent être engagées sans tarder.
Des mesures conservatoires doivent être prises dès à présent, au niveau local, pour redonner confiance dans le système de régulation de l'offre de soins et de gestion de la dialyse tout en assurant la continuité et le renforcement de la qualité et de la pertinence de la prise en charge des patients.
Au niveau national, il est grand temps d'engager une réforme d'ensemble du modèle de financement de la prise en charge de 1' insuffisance rénale chronique. Des responsables politiques comme Alain Milon et Olivier Véran - qui s'étaient rendus récemment à La Réunion dans le cadre de missions parlementaires - se sont exprimés pour souligner les limites du schéma actuel. Cette réforme gagnerait naturellement à s'appuyer sur le pilotage épidémiologique par les données de santé publique : le scandale de la dialyse de La Réunion aurait pu être repéré plus tôt avec une simple mise en regard des données de prévalence et des écarts constatés dans les modes de prise en charge. Les paramètres d' une refonte du modèle de financement de la prise en charge de 1 'insuffisance rénale sont sur la table. Renaloo a, en particulier, porté des orientations claires et opérationnelles en ce sens.
L'engagement politique de cette refonte constituerait un signal fort de rupture avec cette incroyable persistance d'une situation majeure de non pertinence des soins au sein de notre système de santé.
Sur le fond des accusations d ' infractions susceptibles d ' avoir été commises dans ce dossier, c'est naturellement à la Justice qu' il revient de se prononcer. Je continuerai à lui apporter tous les éléments en ma possession.
En prenant à nouveau la parole, mes pensées et mon soutien sont également orientés vers les professionnels de santé. Je suis convaincu que les professionnels engagés au quotidien avec le sens du devoir au service des patients insuffisants rénaux sauront réagir. Ils sauront se démarquer des écarts de comportements de quelques-uns.
Les faits constatés à La Réunion - et susceptibles, en raison du modèle de financement actuel, de se retrouver également pour d'autres opérateurs au niveau national- ne doivent plus jamais être possibles à l'avenir. Nous le devons aux centaines de patients insuffisants rénaux chroniques dont le cours des vies a été et est encore altéré.
Source: Zinfos974. Par David Gruson (ancien directeur général du CHU de La Réunion). Le 13/03/2018.
je prenais la parole pour dénoncer l' instrumentalisation dont le CHU de La Réunion et la FHF avaient été victimes dans le contexte de l'éclatement du scandale de la dialyse à La Réunion. Les développements de ces derniers jours m'amènent à m'exprimer à nouveau.
Dans cette tribune de début octobre, je mettais en exergue le « deux poids, deux mesures » dans les contrôles appliqués aux offreurs de soins à La Réunion.
D'un côté, le CHU n'a cessé de faire l'objet d'inspections et de sollicitations administratives de tous ordres. La transparence constitue bien entendu une exigence fondamentale de la gestion publique. J'ai toujours veillé, dans l'exercice de mes fonctions, à ce que ce principe essentiel soit scrupuleusement respecté. Mais, en l'espèce, force est de constater l'ampleur des moyens mobilisés pour le contrôle du CHU avec une mission diligentée par trois inspecteurs généraux des affaires sociales. Cette mission aboutissait in fine à un rapport reposant sur des éléments factuels majeurs inexacts (sur l'engagement des opérations d' investissement ou sur les effets sur la situation budgétaire du CHU de la forte progression des évacuations sanitaires de patients étrangers en situation irrégulière, principalement venus des Comores) et dont l'établissement et la communication ne respectaient que très imparfaitement les exigences du principe du contradictoire. Ce rapport, pourtant établi six mois plus tôt, réémergeait médiatiquement quelques jours avant le déplacement de la Ministre de la Santé et des Solidarités à La Réunion et à Mayotte au mois de septembre dernier. La Ministre s'est, heureusement, démarquée sur le fond de ce rapport : une décision de soutien au CHU pour l'accueil des patients évacués sanitaires de Mayotte était prise dès août 2017 et la politique d'investissements était validée en COPERMO le 31 janvier dernier.
D'un autre côté, la même rigueur dans les contrôles ne s'appliquait pas à d'autres offreurs de soins. Je mettais en exergue, dès cette tribune d'octobre, les dysfonctionnements issus du modèle économique de la prise en charge de 1 ' insuffisance rénale chronique, dans un contexte de surprévalence triple à La Réunion par rapport à la moyenne nationale. L'association Renaloo - qui représente les patients insuffisants rénaux chroniques- avait souligné avec force les problématiques engendrées à La Réunion par ce modèle pour la qualité de la prise en charge des patients. Une situation absurde et inacceptable a été engendrée conduisant à ce que les patients soient maintenus contre leur intérêt médical en dialyse en centre et en unités de dialyse médicalisées (UDM), modalités les plus lourdes, dont les séances sont plus rémunérées que les autres modes de prise en charge. En conséquence, La Réunion connaît des taux massivement inférieurs à la moyenne nationale pour la dialyse autonome (comme la dialyse péritonéale et 1 'hémodialyse à domicile), mais aussi pour 1 'accès à la transplantation rénale, reconnue comme le meilleur traitement.
Cette situation génère des effets particulièrement lourds et péjoratifs pour la vie de centaines de patients : ils ne reçoivent pas le traitement médical adapté et se voient privés d'une vie familiale et professionnelle normale compte tenu de la lourdeur des séances de dialyse en centres. Ces dysfonctionnements du modèle économique de la dialyse ont été clairement démontrés par la Cour des comptes dès son rapport de 2015. Pourtant, au niveau local, aucun contrôle réel de la gestion des offreurs de soins concernés n'était mis en oeuvre pendant des années.
Cette non-pertinence majeure des soins- très coûteuse, en outre, pour la Sécurité sociale - fondait la saisine opérée en urgence par Renaloo auprès de la Ministre de la Santé à l'occasion de sa visite à La Réunion fin septembre. Je prévenais, quant à moi, la Ministre des risques d'instrumentalisation de son déplacement. De nombreux éléments laissaient, en effet, penser qu'une manoeuvre de diversion avait été orchestrée en septembre, en instrumentalisant le CHU et la FHF, pour que le sujet de la dialyse soit médiatiquement éclipsé et passé sous silence au cours de la visite ministérielle. J'opérais, par ailleurs, un lancement formel d'alerte sanitaire sur la prise en charge de l'insuffisance rénale.
La presse locale réunionnaise ne s'est heureusement pas laissée abuser. Elle relayait ma tribune et les interventions de Renaloo. Dans les semaines qui suivaient, le Journal de 1 "île de La Réunion ne cessait d'apporter de nouveaux éléments aux accusations très graves portées sur la gestion de l'opérateur AURAR depuis le mois de juin (avec notamment l'orientation de «résultats bénéficiaires» massifs par cet opérateur pourtant théoriquement à but non lucratif vers un empilement de structures commerciales annexes éloignées de la prise en charge directe des patients). Le JIR mettait également en doute la transparence du processus d'attribution des autorisations d'exercice des activités de dialyse et la régularité des actes facturés à l'assurance maladie.
Ce lundi, le JIR produit de nouvelles révélations : une compensation du CICE aurait été irrégulièrement versée à l'AURAR et cet opérateur a bénéficié d'une attribution très significative de crédits du Fonds d'intervention régional à la fin de l'année 2017 alors même que le scandale de la dialyse avait déjà été révélé. Les moyens concernés ont été prélevés en tout ou partie sur des enveloppes susceptibles d'être dirigées vers les établissements du service public.
Je suis profondément choqué et en colère à la suite de ces révélations. Au cours des quatre années à la direction du CHU, je me suis engagé, avec les équipes de l'établissement, pour le développement de l'accès à la greffe rénale. J'ai exercé moi-même la présidence du réseau de prélèvements d'organes et nous nous sommes mobilisés pour le renforcement des actions de sensibilisation et de prévention auprès de la population.
Je n'avais pas réalisé, au cours de ces années de fonctions à La Réunion, que les règles du jeu étaient faussées dès le départ. Pendant que ces actions de soutien à la greffe et au développement des prélèvements d'organes étaient engagées, un système opaque tournait à plein régime pour maintenir, contre leur intérêt médical, les patients dialysés en centre et en UDM, dégager de la rentabilité et empêcher concrètement leur orientation vers la greffe ainsi que le développement de modes alternatifs de prises en charge autonomes. J'ai commencé à être alerté sur les tenants et aboutissants réels de ce système et les conflits d ' intérêts associés à partir du milieu de l'année 2017.
Cette situation constitue un détournement majeur de l'objet du modèle privé à but non lucratif, ce qui est très préjudiciable pour notre système de santé dans son ensemble. Je crois pourtant profondément à la pertinence de ce modèle et de ses valeurs. La FEHAP a d' ailleurs eu une attitude exemplaire qu'il faut souligner dans la gestion du cas de l'AURAR.
Ce système déviant n'aurait sans doute pas pu se développer à cette échelle et durer aussi longtemps sans l' existence de situations créatrices de conflits d'intérêt majeurs à des niveaux très importants du système de soins local et dans le cadre de la commission spécialisée de 1 'offre de soins. J'ai contribué, avec d'autres acteurs de santé, à lancer l'alerte sur ces dysfonctionnements et ces conflits d' intérêt.
Des premières réactions des pouvoirs publics sont d'ores et déjà intervenues. Je veux saluer, à cet égard, la mobilisation d'Agnès Buzyn, Ministre de la Santé et des Solidarités sur ce dossier. La Ministre a, en effet, dès le début du mois d'octobre dernier décidé de saisir la Chambre régionale des comptes du dossier de l' AURAR et fait de l'insuffisance rénale chronique une des thématiques prioritaires de pertinence des soins dans le cadre de la stratégie de transformation de l'offre de soins annoncée voici quelques jours par le Gouvernement.
Alain Milon, Président de la Commission des Affaires sociales du Sénat, dénonçait le scandale de la dialyse à La Réunion et la situation de l'AURAR dès l'examen du dernier projet de loi de financement de la Sécurité sociale et engageait une mission d'information parlementaire sur le dossier.
Jean-Louis Touraine démontrait, à l'occasion de sa mission-flash réalisée au mois de décembre dernier, l'ensemble des obstacles concrets .devant encore être levés pour encourager le développement du prélèvement d' organes.
Ces premières réactions doivent encore être amplifiées à très brève échéance. Les situations de non pertinence des soins dans la prise en charge des patients continuent à exister sur le terrain. En outre, les acteurs qui ont pris leurs responsabilités, au niveau local et au niveau national, pour lancer l'alerte ont été victimes de calomnies et de tentatives d' intimidation. J'ai encore été informé ces derniers jours du renouvellement d'actions inacceptables de ce genre.
Pour ces lanceurs d'alerte mais aussi et surtout pour les patients qui doivent bénéficier du mode de prise en charge de l' insuffisance rénale adapté à leurs besoins, nous ne pouvons plus attendre. Des actions fortes doivent être engagées sans tarder.
Des mesures conservatoires doivent être prises dès à présent, au niveau local, pour redonner confiance dans le système de régulation de l'offre de soins et de gestion de la dialyse tout en assurant la continuité et le renforcement de la qualité et de la pertinence de la prise en charge des patients.
Au niveau national, il est grand temps d'engager une réforme d'ensemble du modèle de financement de la prise en charge de 1' insuffisance rénale chronique. Des responsables politiques comme Alain Milon et Olivier Véran - qui s'étaient rendus récemment à La Réunion dans le cadre de missions parlementaires - se sont exprimés pour souligner les limites du schéma actuel. Cette réforme gagnerait naturellement à s'appuyer sur le pilotage épidémiologique par les données de santé publique : le scandale de la dialyse de La Réunion aurait pu être repéré plus tôt avec une simple mise en regard des données de prévalence et des écarts constatés dans les modes de prise en charge. Les paramètres d' une refonte du modèle de financement de la prise en charge de 1 'insuffisance rénale sont sur la table. Renaloo a, en particulier, porté des orientations claires et opérationnelles en ce sens.
L'engagement politique de cette refonte constituerait un signal fort de rupture avec cette incroyable persistance d'une situation majeure de non pertinence des soins au sein de notre système de santé.
Sur le fond des accusations d ' infractions susceptibles d ' avoir été commises dans ce dossier, c'est naturellement à la Justice qu' il revient de se prononcer. Je continuerai à lui apporter tous les éléments en ma possession.
En prenant à nouveau la parole, mes pensées et mon soutien sont également orientés vers les professionnels de santé. Je suis convaincu que les professionnels engagés au quotidien avec le sens du devoir au service des patients insuffisants rénaux sauront réagir. Ils sauront se démarquer des écarts de comportements de quelques-uns.
Les faits constatés à La Réunion - et susceptibles, en raison du modèle de financement actuel, de se retrouver également pour d'autres opérateurs au niveau national- ne doivent plus jamais être possibles à l'avenir. Nous le devons aux centaines de patients insuffisants rénaux chroniques dont le cours des vies a été et est encore altéré.
Source: Zinfos974. Par David Gruson (ancien directeur général du CHU de La Réunion). Le 13/03/2018.