Created by
FJ
Created
jeudi 15 février 2018
La veille de l’annonce par le premier ministre Edouard Philippe d’une réforme de l’ensemble du système de santé, le vice-président du Département Issa Issa Abdou était allé exposer les difficultés de Mayotte en la matière auprès de l’Inspection générale des Affaires sociales.
Le conseiller départemental Issa Issa Abdou a été auditionné par l’Igas, l’inspection générale des Affaires sociales, dans l’objectif de cerner les besoins du territoire en matière de santé. On connaît l’issue heureuse d’une précédente rencontre avec ces inspecteurs qui avait abouti à un rapport pointant les insuffisances de l’Etat en matière de prise en charge de l’enfance en danger et des établissements de Protection maternelle et infantile. Des enveloppes conséquentes avaient été débloquées dans la foulée par le gouvernement.
Outre son domaine d’action dans le social et la santé au conseil départemental, Issa Abdou vient d’être élu à la présidence du conseil de surveillance du Centre Hospitalier de Mayotte (CHM). C’est donc coiffé d’une double casquette qu’il a été entendu par les inspecteurs Bernard Nuytten et Christian Delavaquerie.
L’élu s’était donné comme première priorité la défense de ce qui est devenu un cheval de bataille, le placement du CHM en zone internationale. L’idée émise en son temps par Mansour Kamardine lors de son premier mandat de député, et reprise par Emmanuel Macron dans son discours de Guyane, implique de ne pas lier le lieu de l’accouchement à la nationalité du pays qui l’héberge. Le nourrisson conserverait la nationalité de ses parents.
La zone internationale prévue pour les CHU
Une solution adaptée au territoire pour Issa Abdou, que nous avons joint au téléphone. « Elle permettrait de désengorger le CHM, car ce serait la fin du droit du sol lié à l’établissement, d’alléger la pression pour le personnel médical, d’initier une coopération en matière de santé avec l’Union des Comores avec des bases saines, et de dégager des moyens pour un hôpital qui s’occupe de tous les malades de la zone ». Une solution déjà à l’étude en Guyane, l’ont informé les inspecteurs en réponse, mais qui ne peut s’appliquer qu’aux Centres hospitaliers universitaires et non aux CHM.
Or, nous n’avons pas la fac de médecine nécessaire au label. « Une dérogation serait possible », nous explique l’élu. Sans doute par le biais d’un amendement.
Si cela isole l’hôpital, les inspecteurs faisaient remarquer que cela pourrait inciter les accouchements en dehors des structures relevant du CHM, ce qui serait contreproductif en terme de sécurité sanitaire. L’étude du cas de la Guyane devrait pouvoir apporter des réponses.
La « Santé OI » en faveur de La Réunion
Étonnamment, le 2ème point porte sur la Commission de l’Océan Indien, plus exactement sur l’exclusion de Mayotte de cette instance régionale en raison de la position des Comores. En font partie l’Union des Comores, Madagascar, Maurice, Seychelles et La Réunion. « J’ai voulu évoquer ce point car sur toutes les questions de coopération en matière de santé, La Réunion est censée nous représenter dans un concept de « Santé OI », Océan Indien, mais cela se fait en réalité toujours sur le dos des Mahorais », plaidait l’élu à un public stupéfait, « les inspecteurs pensaient que nous en faisions déjà partie tellement c’est évident ». Une décision politique qui manque là encore de fermeté.
Bien entendu, le sujet de la gouvernance de l’Agence Régionale de Santé a été évoqué. Jusqu’à présent sous la férule réunionnaise, une demande d’indépendance avait été formulée par les élus de Mayotte depuis que l’information d’un déséquilibre de dotation flagrant au profit de La Réunion était connue, qu’a rappelé à l’Igas Issa Abdou « le Fonds régional d’intervention de l’ARS OI s’élevait en 2017 à 76, 5 millions d’euros, alloué à plus de 90% à La Réunion, et moins de 10% à Mayotte, à où elle devrait être de 23% en raison du différentiel démographique. »
Un fléchage direct depuis le ministère est en réflexion avait-on appris, l’avantage d’avoir une « ARS Mayotte » étant à peine à démontrer, car « facilitateur d’un dialogue direct à Mayotte avec un directeur d’agence, et un responsable du développement de la politique de santé sur place, et non un délégué général situé à 1.500 km » plaidait l’élu.
Une première année de médecine
Sur le sujet du financement du CHM et des emprunts toxiques, l’Etat est appelé à la rescousse pour aider à effacer le déficit, également lié à la prise en charge des PMI avant qu’un budget propre soit mise en place au CD, et à la pression migratoire.
Le cinquième point portait sur le code de la santé et le code de l’action sociale, « une extension qui pourra faire bénéficier Mayotte des dispositifs de la CMU-C et de l’Aide médicale d’Etat (AME), qui s’appliquent partout ailleurs.
Enfin, la création d’une première année de médecine au CUFR ne pourra agir que favorablement sur la formation de professionnels locaux, jusqu’alors défavorisé par un numerus clausus qui ne leur bénéficie pas.
Un entretien qui aura duré une bonne partie de la journée de ce lundi, « avec la conviction que j’ai prêché des convaincus. » Les inspecteurs attendaient d’ailleurs cet échange qui va enrichir leur rapport qui devrait être remis fin février début mars. « Il y a des lignes qui vont bouger, j’en suis sûr, il faut espérer que ce soit dans le bon sens », concluait Issa Abdou.
Source:
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
Le conseiller départemental Issa Issa Abdou a été auditionné par l’Igas, l’inspection générale des Affaires sociales, dans l’objectif de cerner les besoins du territoire en matière de santé. On connaît l’issue heureuse d’une précédente rencontre avec ces inspecteurs qui avait abouti à un rapport pointant les insuffisances de l’Etat en matière de prise en charge de l’enfance en danger et des établissements de Protection maternelle et infantile. Des enveloppes conséquentes avaient été débloquées dans la foulée par le gouvernement.
Outre son domaine d’action dans le social et la santé au conseil départemental, Issa Abdou vient d’être élu à la présidence du conseil de surveillance du Centre Hospitalier de Mayotte (CHM). C’est donc coiffé d’une double casquette qu’il a été entendu par les inspecteurs Bernard Nuytten et Christian Delavaquerie.
L’élu s’était donné comme première priorité la défense de ce qui est devenu un cheval de bataille, le placement du CHM en zone internationale. L’idée émise en son temps par Mansour Kamardine lors de son premier mandat de député, et reprise par Emmanuel Macron dans son discours de Guyane, implique de ne pas lier le lieu de l’accouchement à la nationalité du pays qui l’héberge. Le nourrisson conserverait la nationalité de ses parents.
La zone internationale prévue pour les CHU
Une solution adaptée au territoire pour Issa Abdou, que nous avons joint au téléphone. « Elle permettrait de désengorger le CHM, car ce serait la fin du droit du sol lié à l’établissement, d’alléger la pression pour le personnel médical, d’initier une coopération en matière de santé avec l’Union des Comores avec des bases saines, et de dégager des moyens pour un hôpital qui s’occupe de tous les malades de la zone ». Une solution déjà à l’étude en Guyane, l’ont informé les inspecteurs en réponse, mais qui ne peut s’appliquer qu’aux Centres hospitaliers universitaires et non aux CHM.
Or, nous n’avons pas la fac de médecine nécessaire au label. « Une dérogation serait possible », nous explique l’élu. Sans doute par le biais d’un amendement.
Si cela isole l’hôpital, les inspecteurs faisaient remarquer que cela pourrait inciter les accouchements en dehors des structures relevant du CHM, ce qui serait contreproductif en terme de sécurité sanitaire. L’étude du cas de la Guyane devrait pouvoir apporter des réponses.
La « Santé OI » en faveur de La Réunion
Étonnamment, le 2ème point porte sur la Commission de l’Océan Indien, plus exactement sur l’exclusion de Mayotte de cette instance régionale en raison de la position des Comores. En font partie l’Union des Comores, Madagascar, Maurice, Seychelles et La Réunion. « J’ai voulu évoquer ce point car sur toutes les questions de coopération en matière de santé, La Réunion est censée nous représenter dans un concept de « Santé OI », Océan Indien, mais cela se fait en réalité toujours sur le dos des Mahorais », plaidait l’élu à un public stupéfait, « les inspecteurs pensaient que nous en faisions déjà partie tellement c’est évident ». Une décision politique qui manque là encore de fermeté.
Bien entendu, le sujet de la gouvernance de l’Agence Régionale de Santé a été évoqué. Jusqu’à présent sous la férule réunionnaise, une demande d’indépendance avait été formulée par les élus de Mayotte depuis que l’information d’un déséquilibre de dotation flagrant au profit de La Réunion était connue, qu’a rappelé à l’Igas Issa Abdou « le Fonds régional d’intervention de l’ARS OI s’élevait en 2017 à 76, 5 millions d’euros, alloué à plus de 90% à La Réunion, et moins de 10% à Mayotte, à où elle devrait être de 23% en raison du différentiel démographique. »
Un fléchage direct depuis le ministère est en réflexion avait-on appris, l’avantage d’avoir une « ARS Mayotte » étant à peine à démontrer, car « facilitateur d’un dialogue direct à Mayotte avec un directeur d’agence, et un responsable du développement de la politique de santé sur place, et non un délégué général situé à 1.500 km » plaidait l’élu.
Une première année de médecine
Sur le sujet du financement du CHM et des emprunts toxiques, l’Etat est appelé à la rescousse pour aider à effacer le déficit, également lié à la prise en charge des PMI avant qu’un budget propre soit mise en place au CD, et à la pression migratoire.
Le cinquième point portait sur le code de la santé et le code de l’action sociale, « une extension qui pourra faire bénéficier Mayotte des dispositifs de la CMU-C et de l’Aide médicale d’Etat (AME), qui s’appliquent partout ailleurs.
Enfin, la création d’une première année de médecine au CUFR ne pourra agir que favorablement sur la formation de professionnels locaux, jusqu’alors défavorisé par un numerus clausus qui ne leur bénéficie pas.
Un entretien qui aura duré une bonne partie de la journée de ce lundi, « avec la conviction que j’ai prêché des convaincus. » Les inspecteurs attendaient d’ailleurs cet échange qui va enrichir leur rapport qui devrait être remis fin février début mars. « Il y a des lignes qui vont bouger, j’en suis sûr, il faut espérer que ce soit dans le bon sens », concluait Issa Abdou.
Source:
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com