Chandipura : un virus inquiétant venu d’Inde.
L’État du Gujarat (nord-ouest de l’Inde) est actuellement confronté à une épidémie inquiétante qui a débuté en juin 2024 : la résurgence du virus Chandipura. Plus de 100 personnes ont été affectées et 38 patients en ont perdu la vie. Les plus touchés sont pour la plupart les enfants et les adolescents. Comme l’explique la Professeure Manal Mohammed, il existe plusieurs motifs de crainte à son sujet.
L’épidémie est causée par un virus à ARN du genre Vesiculovirus (famille des Rhabdoviridae, celle du virus de la rage), contre lequel il n’existe ni médicament ni vaccin. Son nom est celui du village où il a été identifié en 1965 pour la première fois, dans l’État du Maharashtra (ouest de l’Inde). Il est transmis par des phlébotomes, petits moucherons dont les femelles se nourrissent de sang, mais également et plus rarement, par des moustiques et des tiques.
La maladie débute par un syndrome grippal (céphalées, myalgies, arthralgies, vomissements) et dans l’espace de 2 jours, elle peut évoluer vers un œdème cérébral avec atteinte vasculaire, entraînant une quadriparésie (ou hémiparésie), une aphasie, des convulsions, et pouvant aboutir à un coma, voire à un décès, surtout chez les enfants et les adolescents de moins de 15 ans.
La pathogénicité n’est pas complètement connue. Le virus est vraisemblablement transmis par la salive de l’insecte infecté, s’introduit dans le sang, se multiplie dans les monocytes et réussit à franchir la barrière hématoencéphalique. Dans les cellules nerveuses, il sécrète une phosphoprotéine, sans doute responsable de la rapidité de survenue du décès (moins de six heures après le début de l’infection).
L’épidémie actuelle n’est pas inédite : en 2003, dans l’État d’Andhra Pradesh (centre de l’Inde), sur 329 enfants testés positifs, 183 d’entre eux en sont morts. Une autre est survenue en 2005, dans l’État du Gujarat, lieu de l’épidémie actuelle, où 26 cas avaient été identifiés (dont 20 morts).
Ces chiffres en apparence modestes pour un pays aussi vaste ne doivent pas cacher une inquiétude sérieuse sur l’extension de la distribution géographique du virus. Il a été identifié dans des phlébotomes d’Afrique de l’Ouest en 1991 et 1992 et chez des hérissons au Sénégal entre 1990 et 1996. Des anticorps contre le virus Chandipura ont également été détectés chez des singes sauvages au Sri Lanka, en 1993, vraisemblablement à la suite d’un contact avec le virus.
La résurgence épidémique actuelle peut être associée avec la progression de plusieurs autres maladies virales propagées par des insectes (virus Zika, dengue, virus Nipah, etc.). Elles sont très probablement en lien avec le réchauffement climatique, qui favorise la prolifération de ces vecteurs. La vigilance est donc d’actualité.
Source : https://www.univadis.fr/