Bonnes et mauvaises nouvelles de la Covid-19
Résumé
La recherche continue autour de la Covid-19, tant sur son épidémiologie, ses séquelles, les effets de la vaccination que sur l’origine des formes persistantes (Covid long). Récemment, une dizaine de publications ont suscité de nombreux commentaires et ouvert de nouvelles pistes.
En mesurant les concentrations sanguines de plus de 6 600 protéines chez des personnes souffrant de Covid long, une équipe a identifié des anomalies biologiques capables de prédire cette forme prolongée de la maladie, ce qui pourrait contribuer à identifier les marqueurs diagnostiques qui manquent cruellement, mais aussi suggérer des candidats en termes de traitement. Des auteurs chinois ont, eux, signalé des effets positifs d’un traitement à base de probiotiques dans le Covid long.
Également d’intérêt, une étude a identifié des anomalies biologiques et anatomiques associées aux troubles cognitifs, fréquents lors de Covid long. Une autre a évoqué la possibilité que, comme après la pandémie de grippe espagnole, celle de Covid-19 puisse engendrer une vague de syndromes parkinsoniens dans les années ou décennies à venir.
Enfin, divers travaux confirment l’efficacité des vaccins dans la prévention du Covid long, chez les adultes comme chez les enfants.
Janvier 2024 et les derniers mois de 2023 ont été riches en publications intéressantes autour de la Covid-19, et en particulier autour du Covid long. Nous vous proposons un tour d’horizon de celles qui ont suscité le plus d’intérêt.
Une piste sérieuse vers des marqueurs spécifiques du Covid long
Une étude importante vient d’être publiée dans la revue Science [1] sur les modifications observées dans le sang après un épisode de Covid-19. Pendant 1 an, les auteurs ont suivi 268 personnes, dont 113 avait eu un épisode de Covid-19. Parmi celles-ci, 40 présentaient encore des symptômes 6 mois après l’épisode initial (donc un Covid long). Leurs prélèvements sanguins ont été soumis à une analyse poussée : les concentrations d’environ 6 600 protéines ont été mesurées, à la recherche de différences significatives entre les groupes de patients. Il ne s’agissait pas de cibler certaines protéines, mais d’explorer l’ensemble des protéines mesurables, sans a priori.
Chez les patients souffrant de Covid long, les auteurs ont mis en évidence des concentrations plus faibles d'antithrombine (inhibiteur de la coagulation) et des concentrations plus élevées de thrombospondine-1 et de facteur de von Willebrand - deux facteurs associés à la formation de thromboses. De plus, il a été constaté une activation accrue de la cascade du complément pendant la phase aiguë de la maladie, qui persistait 6 mois après la fin de cette phase. Plus précisément, il s'agissait d'anomalies de la formation du complexe terminal du complément (TCC) qui, en s’intégrant dans les membranes cellulaires, déclenche l’activation ou la lyse des cellules, contribuant ainsi à des dommages tissulaires (ce qui active la cascade du complément, dans une boucle délétère).
Globalement, les sujets atteints de Covid long avaient des taux élevés de marqueurs de lésions tissulaires et une signature thrombo-inflammatoire, caractérisée par une augmentation des marqueurs d'activation endothéliale, une lyse des globules rouges, une hausse des marqueurs d'activation plaquettaire et des agrégats monocytes-plaquettes, en particulier chez les personnes dont les symptômes persistaient depuis plus de 12 mois.
Enfin, ces patients présentaient des signes d'activation persistante de la voie classique du complément médiée par les anticorps, associés à une augmentation des taux d'immunoglobulines G anti-CMV (cytomégalovirus) et anti-EBV (virus d'Epstein-Barr). Il avait déjà été suggéré par d’autres auteurs que l’activation de ces virus pendant la phase aiguë augmentait le risque de développer un Covid long. Ces anomalies avaient aussi été repérées dans d’autres études, de manière moins systématique .
L’importance de ce travail colossal a été de fournir de bons candidats pour un éventuel test diagnostique du Covid long, test qui manque cruellement aujourd’hui et dont l’absence oblige les praticiens à identifier cette maladie par élimination des autres causes possibles des symptômes observés.
De plus, certains médicaments existent pour bloquer la cascade du complément, qui pourraient faire l’objet d’études cliniques dans le contexte du Covid long.
Vers une épidémie de maladie de Parkinson post-Covid-19 ?
Autre mauvaise nouvelle, des chercheurs américains [6] sont parvenus à infecter in vitro, par le SARS-CoV-2, des neurones dopaminergiques du mésencéphale dérivés de cellules souches pluripotentes humaines. Cette infection a déclenché une réponse inflammatoire et une sénescence cellulaire. Toujours in vitro, ces effets négatifs étaient atténués par trois médicaments : la metformine, l'imatinib et le riluzole.
Devant ces résultats, les auteurs ont recherché, dans la substance noire de 13 personnes décédées et ayant eu une Covid-19, des signes de souffrance des neurones sécrétant la dopamine. Une signature inflammatoire, une sénescence cellulaire des neurones dopaminergiques ainsi que de faibles niveaux d’ARN de SARS-CoV-2 ont pu être identifiés dans leur substance noire (mais pas dans des prélèvements sur des sujets décédés n’ayant pas eu de Covid-19). En outre, ils y ont observé un nombre réduit de neurones et de fibres dopaminergiques chez les patients ayant eu une forme sévère de Covid-19.
Si ces résultats reflètent ce qui peut se passer dans la substance noire lors d'une Covid-19, cela signifierait que certaines personnes infectées pourraient être exposées à un risque accru de développer, à terme, une maladie de Parkinson, comme évoqué par ailleurs [7, 8]. Pour rappel, après la pandémie de grippe espagnole, une maladie neurologique était apparue (l’encéphalite léthargique ou maladie de von Economo) qui se compliquait fréquemment d'un syndrome parkinsonien après quelques années, voire des décennies [9, 10, 11]. En conséquence, les auteurs de l’étude alertent les praticiens et recommandent une grande vigilance vis-à-vis d’une possible flambée de maladie de Parkinson dans les années à venir.
https://www.vidal.fr/actualites/30633-bonnes-et-mauvaises-nouvelles-de-la-covid-19.html
Source : https://www.vidal.fr/