Radiothérapie : prévention et prise en charge des effets secondaires cutanés.
La radiothérapie, un des traitements fréquemment employés pour traiter certains cancers, seule ou en association avec d’autres thérapies, repose sur l’exposition du patient à des rayonnements afin de détruire les cellules cancéreuses. Parmi les effets secondaires, elle peut entraîner des radiodermites. Quelle prévention ? Quels traitements ?
Radiodermites
Les radiodermites sont des lésions qui affectent la peau après une exposition aux rayonnements ionisants (photons, électrons…).
Les kératinocytes différenciés de la couche superficielle de l’épiderme sont radio-résistants. En revanche, les kératinocytes de la couche basale, indifférenciés sont radiosensibles. Lésés par les rayons ionisants, ils ne pourront plus assurer le remplacement des kératinocytes différenciés qui auront achevé leur cycle cellulaire, ce qui explique l’apparition retardée des symptômes.
Il s’agit d’un mécanisme différent des brûlures par ultra- violet et des brûlures chimiques ou thermiques qui lèsent les kératinocytes différenciés de la couche superficielle et donnent donc des lésions précoces (voir schéma ci-contre).
Les radiodermites aiguës apparaissent pendant les six premiers mois après le début des rayons. Elles surviennent en général pendant ou juste après la radiothérapie. Elles sont très fréquentes, peu graves et réversibles. En revanche, les radiodermites tardives, apparaissant entre les six mois après le début jusqu’à trente ans après le traitement sont, quant à elles, occasionnelles mais de gravité progressive et irréversibles.
Radiothérapie : informer les patients
Seule la peau traitée est à risque de réaction. Lors de la consultation médicale pré-radiothérapie, primordiale et obligatoire, le malade est informé des effets secondaires potentiels et de leurs délais d’apparition. Il est mis en garde contre les idées reçues. Par exemple, il doit éviter toute automédication, en particulier l’utilisation de certaines huiles essentielles ayant un effet perturbateur hormonal et donc déconseillées dans les irradiations mammaires en particulier. Il est également utile de prévenir le patient des risques de radio-sensibilisation et d’eczématisation avec certains produits.
La grande règle de base est une hygiène simple comme la douche avec un savon très doux et un séchage minutieux.
Radiodermite : prévention et hygiène
En pratique, l’idéal est d’appliquer au maximum sur la peau des crèmes hydratantes, en couches fines en les faisant bien pénétrer, jusqu’à la veille du premier jour de radiothérapie.
Le jour de la première séance de traitement, il est indispensable de prendre une douche simple avec de l’eau et du savon, de ne surtout pas mettre de crème sur la zone à traiter, en raison du risque d’effet « bolus », et de porter des vêtements amples en coton. Pour une irradiation mammaire, un soutien-gorge en coton de type brassière sans armatures – dont le frottement accentue l’irritation – ni fibres élastiques est conseillé.
Si l’épilation est nécessaire, il faut éviter le rasage et privilégier les ciseaux ou la tondeuse.
Pendant la radiothérapie, il faut lutter contre la macération en portant des vêtements larges, sécher la zone irradiée par un tamponnement délicat, en se méfiant du sèche-cheveux même froid qui pourrait être réglé inopinément sur chaud. Il est conseillé de ne pas mettre de compresses entre le vêtement et la peau, de ne pas utiliser des irritants cutanés comme les parfums ou sprays alcoolisés, du talc, des adhésifs ou des vêtements trop serrés…
Enfin, il faut protéger les marquages (qui permettent aux manipulateurs radio de cibler la zone à irradier) en cas de baignade ou lors de la toilette, éviter les expositions de la zone irradiée au soleil et proscrire les saunas, hammams et gommages durant toute la durée de la radiothérapie et l’année qui suit. Les cures thermales à visée cutanée post-radiothérapie sont en cours d’évaluation.
Il est important de noter qu’aucune étude n’a démontré de manière indiscutable la supériorité d’un traitement préventif ou curatif au sujet des radiodermites. Cette absence de consensus résulte de l’insuffisance d’étude contrôlée ou suffisamment informative.
De nombreux facteurs peuvent favoriser et/ou aggraver la radiotoxicité aiguë : des chimiothérapies concomitantes cytotoxiques, des radiothérapies touchant les zones de plis et/ou la peau est plus fine (régions axillaires, sous-mammaires, périnéales, la tête et le cou), un âge élevé, une immunodépression (médicale ou thérapeutique), un tabagisme, une dénutrition ou simplement un contexte génétique, sans oublier certains médicaments photosensibilisants.
En résumé :
- Le matin avant la séance de radiothérapie : douche avec eau et savon…
- Séance de radiothérapie…
- Retour à la maison et application de crème hydratante…
- Le lendemain matin, douche avant de se rendre à la nouvelle séance de radiothérapie
Radiodermite : les différents grades de dermite
Il existe une cotation de la radiodermite selon la National Cancer Institute (NCI) :
- grade 0 : absence de toxicité,
- grade I : faible érythème ou desquamation sèche,
- grade II : érythème modéré à vif ; desquamation suintante en plaques, affectant principalement les plis et replis cutanés ; oedème modéré,
- grade III : desquamation suintante en plaques, affectant d’autres zones que les plis et replis cutanés ; saignement induit par des traumatismes ou abrasions mineures,
- grade IV : mise en jeu du pronostic vital ; nécrose cutanée ou ulcération de toute l’épaisseur du derme ; saignement spontané des sites affectés ; indication de greffe cutanée,
- grade V : décès.
L’évolution du traitement radiothérapique
La réaction aiguë la plus courante est l’oedème de la zone irradiée.
En cas d’irradiation de la zone ORL, et afin de préserver l’alimentation entérale, il sera préconisé de poser, avant de débuter le traitement, une sonde naso-gastrique ou une GPE (gastrostomie percutanée endoscopique), dispositif dans lequel un tube d’alimentation flexible est placé à travers la paroi abdominale dans l’estomac.
En cas d’irradiation mammaire, presque tous les patients subissent des perturbations du drainage lymphatique à la hauteur du sein irradié qui se manifestent par un gonflement de la peau et des tissus sous cutanés.
Conclusion
La prise en charge des complications cutanées des traitements par radiothérapie nécessite une surveillance dans la phase aiguë du traitement et une prise en charge sur le long terme pour essayer d’anticiper la survenue de complications graves ou définitives par une équipe qualifiée bénéficiant de formations continues.
Source : https://www.actusoins.com/ Corinne Petot / Photo © Salieges/BSIP